Retour sur la conférence grand public à Argelès-sur-Mer le 3 octobre 2022

Environ 130 personnes ont assisté à cette conférence scientifique ouverte à tous à Argelès-sur-Mer le lundi 03 octobre 2022. 

L’Agence d’URbanisme CAtalane (AURCA), en charge de l’animation de l’ObsCat, et la Communauté de Communes Albères-Côte Vermeille-Illibéris (CCACVI) ont réuni les partenaires pour proposer une soirée de découverte sur le littoral.

 

Ici le diaporama présenté


Ici la vidéo 

 

  

Les propos introductifs :

Antoine Parra en tant que Président de la Communauté de Communes Albères-Côte Vermeille-Illibéris (CCACVI) a ouvert la conférence. Il a remercié le public d'être venu si nombreux à assister à cette conférence souhaitée par la collectivité pour livrer les dernières expertises sur le trait de côte. François-Xavier Hallé, en charge de la GEstion des Milieux Aquatiques et Prévention des Inondations (GEMAPI) a expliqué le fonctionnement de cette compétence appliquée à l’échelle intercommunale depuis 2019. 

Provence Lanzellotti, géographe et animatrice de l’ObsCat a présenté l’Observatoire de la côte sableuse catalane et son fonctionnement. Elle a rappelé qu’il s’agit d’un outil de connaissance et d'aide à la décision sur le littoral sableux catalan, à l'échelle de l'unité hydro-sédimentaire entre le Racou (Argelès-sur-Mer) et Cap Leucate. Cette unité fait abstraction des limites administratives et constitue l’échelle pertinente d’observation et de gestion du littoral. L’objectif de l’ObsCat est de mieux connaître pour mieux comprendre l’évolution de notre littoral sableux et ainsi mieux appréhender les risques érosion et submersion marine sur ce périmètre. Cette unité sédimentaire présente une morphologie particulière. Elle est caractérisée par une dérive littorale dominante orientée du sud vers le nord (sauf à l’extrême sud), par une granulométrie de sable importante et la présence de cordons dunaires bas et fixés en arrière. 

Les présentations scientifiques : 

Les trois présentations scientifiques consistaient à retracer l’évolution du littoral depuis 20 000 ans, exposer les observations actuelles et esquisser des tendances d’évolution. Après ces exposés le public a pu prendre la parole. Neuf personnes se sont exprimées, nous avons intégré ici les réponses aux deux questions posées qui concernaient directement le sujet de la conférence. 

Hier : comment le littoral a évolué jusqu’à aujourd’hui ? par Nicolas Robin, enseignant chercheur au Centre de formation et de recherche sur les environnements méditerranéens (Cefrem) à l’Université de Perpignan. Avec son équipe, Nicolas Robin développe des projets de recherche appliquée sur les thématiques littorales. Il suit le mouvement des stocks sédimentaires et notamment les barres d’avant-côte, il étudie l’épaisseur et la nature du système littoral, il développe des expérimentations pour mieux comprendre l’action du vent. 

Il a présenté les grandes phases d’évolution du littoral jusqu’à aujourd’hui en énonçant les principales causes de l’érosion actuelle. Il a également exposé les techniques de sondage en mer et à terre pour déterminer le volume et la nature des stocks sédimentaires présents. Ces expertises apportent de l’information quant à la capacité de résilience du système littoral.

Enfin, il a présenté l’étude reconstituant l’histoire morpho-sédimentaire du sud de l’unité du Roussillon, de part et d’autre du port d’Argelès. L’évolution de la position du trait de côte et les bilans sédimentaires permettent de dégager un schéma conceptuel de fonctionnement.

Sur ce site à l’évolution complexe les phénomènes érosifs sont dus à une conjonction de causes et de perturbations : 

  • la situation du site en fin d’unité sédimentaire et en limite de côte rocheuse,

  • l’absence de source sédimentaire conséquente d’origine terrestre à proximité,

  • la présence d’éperons rocheux sous-marins longitudinaux et transversaux, 

  • la forte pente des petits fonds marins en lien avec la forte granulométrie des sédiments, 

  • la présence d’ouvrages portuaires à l’exutoire de la Massane,

  • la présence de points durs en haut de plage (habitations, muret) fixant artificiellement les limites transversales du système littoral,

  • l’orientation divergente, vers le sud, de la dérive littorale,

  • la pénurie globale en sédiment due à l’artificialisation des bassins versants et les prélèvements passés directement dans les lits des cours d’eau. 

 

Aujourd’hui : comment le littoral est étudié, pour quels résultats ? par Eric Palvadeau, géologue et chef de projet littoral au BRGM. Cet établissement public mène des actions de recherche et d’expertise, il intervient dans le suivi du littoral au travers d’observatoires du littoral en Métropole et Outre-mer. Avec son équipe, Eric Palvadeau se charge d’organiser les deux campagnes annuelles de mesures, en mer et à terre, sur les 44 kilomètres de la côte sableuse catalane. Il compile et interprète les données pour qualifier l’évolution du littoral sableux du Roussillon depuis 2013 et mieux évaluer l’efficacité des modes de gestion. 

Il a présenté les techniques de suivi qui permettent de comprendre le fonctionnement actuel des compartiments du système littoral sableux : la dune, la plage émergée et la plage immergée. Cette partie immergée renferme la plus grande partie des stocks sédimentaires constituant le système littoral sableux. Son évolution est étudiée en comparant les levés bathymétriques (du relief sous-marin) réalisés deux fois par an sur le terrain au moyen d'un sondeur. Ces mesures viennent compléter les levés terrestres (topographie) sur les plages émergées et les dunes, réalisées maintenant à l’aide d’un LIDAR aéroporté. Il a également expliqué comment des webcams permettent de collecter des informations sur le fonctionnement du littoral pendant une tempête

Demain : quelles sont les tendances futures d’évolution du littoral ? par Alexian Ajas, géologue, chargé d’études au pôle littoral à l’EID-Med. Cet établissement public crée en 1959 est dédié à la gestion des nuisances liées aux moustiques autour de la Méditerranée. Il s’est doté d’un service de restauration des milieux dunaires dans les années 1980 afin de développer le génie écologique et éviter les submersions marines favorisant les éclosions. Aujourd’hui ce service est toujours actif pour la réalisation de travaux de restauration dunaire mais également pour des études et des suivis sur le domaine littoral. Alexian Ajas se charge de synthétiser les données d’observations pour dégager des tendances et des projections. 

L’objectif de cette étude est de dégager une tendance d'évolution par « régression linéaire » et cartographier la position projetée du trait de côte par beau temps à l’horizon 2050. C’est une première étape pour se projeter à 30 ans, il ne s’agit pas de modéliser des tempêtes extrêmes mais de commencer à sensibiliser les publics de façon non-anxiogène à l’adaptation. 

Il est rappelé que le trait de côte n’est qu’un indicateur parmi d’autres permettant de qualifier un état érosif. Cet indicateur ne donne pas d’information sur les stocks sédimentaires disponibles, il informe simplement sur la limite entre la terre et la mer (cf photo ci-contre) par des représentations en deux dimensions. Sur la côte sableuse catalane des secteurs où le trait de côte est artificiellement fixé ne ressortent pas comme "en recul", pourtant les bilans sédimentaires à terre sont déficitaires.  

 

 

Sur les 11 dernières années on observe une tendance nette au recul du trait de côte en Roussillon. La projection en 2050 annonce naturellement la même tendance. Il est précisé que cette tendance est issue de l'application d'une méthode qui comportent des biais et donc une marge d'erreur. Des variations sont notables selon les secteurs. Sur le périmètre de la CCACVI, l'embouchure du Tech est la zone où le recul projeté risque d'être le plus important (cf illustration ci dessous). 

Les stratégies d'adaptation : 

La CCACVI a terminé par une présentation des actions mises en œuvre à court et moyen termes pour répondre à la nécessité de s’adapter au changement climatique et gérer les risques côtiers. Quatre exemples ont été détaillés :

              • action 1 : saisir l’opportunité des travaux de réfection de la digue du port pour recharger la plage du Racou ;
              • action 2 : se doter d’un outil d’alerte pour mieux se préparer aux évènements extrêmes dès aujourd’hui ;
              • action 3 : mettre en œuvre un plan raisonné d’entretien des plages pour atténuer les effets de l’érosion à court terme ;
              • action 4 : se fédérer pour définir la stratégie d’adaptation avec l’appui du CEREMA

Les modes de gestion appliqués aux communes d’Argelès et Elne sont réversibles. Les plages ne sont pas équipées d’ouvrages de fixation du trait de côte (épis ou brises lames). Ailleurs ces ouvrages lourds permettent pour l'instant de conserver une certaine largeur de plage émergée là où elle est nécessaire mais ne règlent pas le problème de l’érosion (le déficit sédimentaire). Ces batteries d'ouvrages provoquent même un recul du trait de côte en aval dérive littorale. 

Peu de questions ont été soulevées sur cette partie plus opérationnelle hormis sur les moyens financiers. Les financements des suivis et des études réalisées sur l’unité sédimentaire du Roussillon sont multiples :

      • les structures scientifiques elles-mêmes (BRGM, UPVD, EID, Cerema) ;
      • les collectivités maîtres d’ouvrages (Leucate, PMM, CCSR et CCACVI) ;
      • l’Agence de l’Eau ;
      • l’Etat ;
      • la Région Occitanie ;
      • l’Europe (fonds FEDER).

Cette diversité de partenariats publics à l'échelle locale, régionale, nationale et au delà garantie une impartialité des l'expertises produites. 

Pour poursuivre la communication l'ObsCat prévoit d’autres formats d'échange à destination du grand public au moment de la livraison des résultats, afin que les personnes intéressées par le sujet puissent participer et s’exprimer dans un contexte apaisé.

L’organisation d’évènements portant sur la démarche scientifique en général est également identifiée localement comme un besoin. 

Enfin, nous rappelons que l’ObsCat est un observatoire scientifique qui apporte humblement sa part de réflexion dans un contexte d’incertitudes. Ce n’est pas un dispositif visant à répondre précisément à toutes les problématiques environnementales dans la diversité de leurs dimensions. 

L’ObsCat remercie les élus et techniciens de la commune de l’Argelès et la CCACVI, les experts et l’ensemble des participants.

Crédit photos : CCACVI et ObsCat.
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